Notion théorisée aux Etats-Unis, le présentéisme caractérise un salarié non productif mais physiquement présent sur son lieu de travail. Plus précisément, cette maladie est le résultat d’une souffrance, d’une démotivation ou à l’inverse d’un engagement trop excessif de l’employé envers son entreprise. Afin de comprendre au mieux cette pathologie, l’équipe journalistique du site Welcome To The Jungle a interrogé Madame Océane MARCHAND, psychologue et experte sur le bien-être au travail. C’est donc à partir de cette analyse, que nous vous présentons les symptômes du présentéisme ainsi que quelques conseils pour lutter contre ce mal-être.

Les différentes formes et causes du présentéisme

Tout d’abord, Madame MARCHAND explique pourquoi le présentéisme est un phénomène très inquiétant au sein des entreprises. En effet, pour la psychologue, il s’agit d’un « comportement alternatif à l’absentéisme et contrairement à ce que l’on peut croire, le présentéisme est indéniablement plus fréquent que l’absentéisme. En outre, lorsque l’on s’absente de son lieu de travail, c’est visible tandis que le présentéisme lui est invisible. C’est ce qui le rend moins considéré ».

Actuellement cette pathologie s’identifie sous trois formes :

Le présentéisme contemplatif qui consiste à être uniquement présent sans pour autant être productif. Pour la psychologue, ce phénomène est la cause d’une grande insatisfaction de l’employé vis-à-vis de sa qualité de vie et de ses conditions de travail : « il peut s’agir d’une impossibilité pour le salarié de prendre des décisions sur son organisation, d’un manque de support du supérieur hiérarchique, d’un salaire insuffisant, d’une insécurité de l’emploi ou l’absence de congés maladie ».

Le présentéisme stratégique qui consiste à faire acte de présence afin d’être bien vu par ses collaborateurs et ses supérieurs. Ce comportement se distingue en particulier dans les entreprises valorisant « la compétition, l’engagement organisationnel et la performance et où le fait de venir même si l’on est malade est considéré comme un acte héroïque ». Par ailleurs, Madame MARCHAND précise qu’une « culture mettant en avant le sens du devoir, le perfectionnisme, la volonté d’exemplarité et de solidarité avec ses collègues peut aussi encourager, consciemment ou inconsciemment le sur-travail. D’autres facteurs comme l’ennui dans la sphère privée, ou plus positivement la passion pour son travail peuvent aussi conduire à un excès de présence ».

Le surprésentéisme qui consiste à faire des heures supplémentaires pour achever une mission chronophage et qui peut « s’imposer pour éviter l’accumulation de tâches pour soi ou ses collègues, mais aussi pour honorer des échéances par pur professionnalisme ou perfectionnisme ».

Les risques du présentéisme

A première vue, l’on pourrait penser que le présentéisme est une opportunité pour les entreprises. Cependant, ces heures supplémentaires non rémunérées représentent une véritable perte puisqu’elles correspondent à un surinvestissement non productif. Par conséquent, la qualité du travail réalisé est moindre ce qui peut aboutir à une dégradation du climat social et à des coûts d’image importants, en particulier si les insatisfactions des clients se font de plus en plus fréquentes.

Plus grave encore, le présentéisme peut s’avérer néfaste pour la santé du collaborateur en favorisant l’apparition de certaines pathologies liées à une grande fatigue et à une importante accumulation de stress, comme des arrêts cardiaques ou des accidents cérébraux. Le Japon, pays le plus impacté par ce phénomène, possède même dans son lexique un terme désignant la mort subite des cadres et des employés sur leur lieu de travail : « Karoshi » ou « mort par dépassement du travail ». Entre 2010 et 2015, selon le Ministère de la Santé du Travail et des Affaires sociales, les autorités japonaises auraient recensé plus de 700 décès de ce type.

Le présentéisme en France

Même si elle est moins impactée que le Japon, la France est également touchée par ce phénomène. D’après une enquête menée par Glassdoor en Octobre 2019 :  « un français sur trois n’ose pas quitter son bureau avant 18h, au point qu’un employé interrogé sur cinq avoue travailler sur des tâches personnelles pour faire passer le temps au bureau. Une personne interrogée sur quatre (28%) se sent gênée d’être la dernière arrivée et 30% des sondés estiment qu’il est mal vu de quitter l’entreprise avant 18h. Enfin les salariés interrogés se sentent jugés, au point qu’un sur quatre (26%) admet être déjà resté au bureau sans être efficace, juste pour être bien vu ».

Madame Marchand explique aussi « qu’au Danemark, en Suisse et aux Etats-Unis, celui qui reste au bureau après 18h est mal vu. On le soupçonne de manquer d’organisation, d’équilibre, de papillonner sur Facebook, voire même de négliger son couple et ses enfants. Au Québec, les horaires sont 9h – 16h30 et rester après est considéré comme un manque d’organisation. Outre-Atlantique, cette façon de travailler donne plus de temps pour les activités extra-professionnelles ce qui représente un très bon vecteur de santé ».

Comment prévenir ou minimiser le présentéisme

Dans le monde professionnel français, l’hyper-sollicitation, l’hyperactivité et l’hypercompétitivité sont glorifiées au détriment des résultats. C’est donc à force de privilégier la quantité à la qualité que le présentéisme a pu se développer au sein de nombreuses compagnies françaises.

De ce fait, pour redynamiser l’efficacité des employés, les entreprises doivent être les garants de leur bien-être physique et psychique. Encourager un rapport serein et pondéré au travail a des effets positifs à la fois sur la productivité mais également sur l’épanouissement humain. Pour cela, plusieurs méthodes peuvent être envisagées :

  • La réorganisation du travail et inclure les salariés et les instances représentatives du personnel dans un débat transparent et ouvert sur le mieux-être en entreprise.
  • Mettre en place des horaires d’ouverture et de fermeture des locaux à 18h.
  • Instaurer un droit à la déconnexion et une charte de bonne conduite.
  • Interdire l’envoi d’emails ou les convocations les soirs après 18h et pendant les Week-Ends.
  • Attribuer des primes de performances en fonction des résultats mensuels et non pas en fonction des horaires effectués.

En conclusion, travailler efficacement ne signifie pas forcément rester jusqu’à 21h tous les jours derrière son bureau. En effet, tant que vos objectifs sont accomplis, vous n’avez aucune raison de culpabiliser et de rester tardivement à votre poste. Pensez également à prendre le temps de vous épanouir et soyez toujours motivé par la recherche d’un équilibre serein entre votre vie professionnelle et votre vie personnelle.

Source : Welcome To The Jungle

Publié le 10/07/2020

Par : Cédric FAURET – Chargé de Recrutement


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